Le 15 octobre 2021 – A l’occasion de ses 20 ans, la Fondation Sopra Steria-Institut de France dévoile les résultats d’une étude réalisée avec l’Agence nouvelle des solidarités actives (Ansa) sur le thème « Numérique et fragilités humaines ».
Afin de mieux comprendre la place du numérique dans la vie des personnes en situation de précarité, et plus particulièrement dans le contexte de la crise sanitaire, la Fondation Sopra Steria-Institut de France et l’Ansa révèlent les résultats d’une enquête menée auprès d’intervenants sociaux, institutions et acteurs de la médiation numérique à travers le territoire français, sur un échantillon de 335 personnes.
La crise sanitaire, révélateur de fragilités sociales multiples
Par son ampleur et ses conséquences dans la vie quotidienne, la crise sanitaire s’est rapidement transformée en crise sociale touchant de plein fouet les personnes les plus précaires. Elle a aussi révélé de nouvelles fragilités humaines, en particulier pour les publics dont les situations économiques et sociales étaient peu stabilisées avant la pandémie.
Comme le révèle l’enquête, au-delà des questions d’emploi et de perte d’activité – et donc de revenus – la période a renforcé les difficultés induites par :
- La fermeture des lieux d’accueil physiques, amenant plus de complexité dans l’accès aux services d’accompagnement et aux droits ;
- Le suivi de la scolarité dans le cadre de « l’école à la maison » ;
- L’isolement et la souffrance psychique.
Interrogés au sujet des conséquences de la crise sanitaire sur les profils des publics accueillis, 43 % des intervenants sociaux et médiateurs numériques affirment avoir accompagné de nouveaux publics, qui ne fréquentaient pas leurs structures avant le début de la pandémie. Travailleurs indépendants, étudiants, intérimaires ou salariés au chômage partiel sont autant de publics qui, jusqu’alors épargnés, se sont trouvés particulièrement fragilisés et ont été contraints de faire appel aux structures d’accompagnement.
Par ailleurs, 84 % des répondants soulignent le fait que les difficultés d’usage des outils et services numériques ont renforcé le risque de précarisation des personnes pendant la crise sanitaire, à un moment où l’accès aux droits passe plus que jamais par le numérique.
Le numérique, terreau fertile pour de nouvelles modalités d’accompagnement des publics en situation de vulnérabilité
Si le numérique peut impressionner les personnes fragilisées comme ceux qui les accompagnent, la crise sanitaire a toutefois permis d’accélérer les processus d’acculturation déjà à l’œuvre et fait émerger des pratiques innovantes pour renforcer le lien social, organiser les appuis collectifs et individuels, être à l’écoute des plus isolés, etc. Ainsi, 73 % des participants estiment que la crise sanitaire a renforcé la place du numérique dans l’accompagnement des publics les plus précaires, et plusieurs répondants perçoivent le numérique comme un levier pouvant contribuer à l’autonomie des personnes, si elles sont accompagnées et mises en confiance dans leurs usages.
« Cette étude témoigne du fait que le numérique peut constituer un terreau fertile d’évolution des pratiques d’accompagnement social des personnes en situation de fragilité. Pour elles-mêmes d’abord, en leur permettant d’être plus autonomes dans les démarches à réaliser pour l’accès aux droits et aux prestations sociales ; pour les professionnels et intervenants sociaux, en libérant du temps lors des échanges directs pour se concentrer sur le cœur de leur mission : être à l’écoute, accompagner, conseiller et orienter. Mais cette « promesse » d’un numérique facilitateur de la relation accompagnant-accompagné ne se réalisera pas sans la prise en compte de plusieurs conditions de réussite en direction de l’un et de l’autre », explique Michèle Pasteur, directrice de l’Agence nouvelle des solidarités actives.
Le défi d’un numérique pleinement inclusif et « capacitant »
Face à l’augmentation des publics en demande d’aide, 38 % des intervenants sociaux et médiateurs numériques interrogés ont répondu ne pas s’être sentis capables d’aider les personnes en difficulté avec le numérique. Parmi les raisons évoquées, les participants ont indiqué un manque de compétences et de formation pour aider les publics en difficulté, mais aussi un manque d’outils adaptés. En effet, les résultats de l’étude montrent que lorsque l’outil numérique ne permet pas de prendre en compte les logiques propres à l’intervention sociale, voire déforme les pratiques, il est « incapacitant » pour les personnes et les intervenants sociaux qui perdent alors en autonomie et en capacité d’action sur leurs propres pratiques.
« Depuis 20 ans, la Fondation Sopra Steria-Institut de France soutient des projets mettant les technologies du numérique au service de l’humain et de l’environnement. Nous sommes convaincus que l’acquisition et l’utilisation de compétences numériques sont un facteur incontournable d’intégration dans la société. Les résultats de l’étude réalisée par l’Ansa en témoignent : le numérique offre de formidables opportunités pour faciliter le quotidien des publics fragilisés, mais ces résultats pointent encore des situations pour lesquelles les professionnels de l’action sociale ont l’impression de subir les outils numériques. C’est pourquoi, à l’occasion de ses 20 ans, la Fondation Sopra Steria-Institut de France s’est associée à l’Ansa afin de formuler 5 propositions concrètes pour relever les défis à venir et faciliter l’interaction entre innovation numérique et innovation sociale », indique Dominique Lambert, déléguée générale de la Fondation Sopra Steria-Institut de France.
5 propositions pour un numérique au service de tous
En accord avec les propositions formulées par le Haut conseil du travail social et avec l’enjeu de création d’un « service universel numérique » pour garantir l’accès aux droits et la lutte contre le non-recours , la Fondation Sopra Steria-Institut de France et l’Ansa formulent les 5 préconisations suivantes :
- Concevoir les solutions numériques avec les experts d’usage en garantissant la participation effective des utilisateurs finaux, et en renforçant la participation des acteurs de la médiation numérique, professionnels de l’accompagnement social et intervenants sociaux.
- Prendre en compte la diversité des situations des personnes en développant des services numériques orientés « solutions », en personnalisant l’offre de services, adaptée à chaque situation et à son évolution, et en prenant en compte le temps d’appropriation du service numérique par les utilisateurs.
- Développer des services numériques facilement appropriables et à visée « capacitante » pour les futurs utilisateurs en privilégiant des approches souples et ludiques, en s’inspirant des solutions expérimentées à des fins de lien social et de solidarité, des solutions numériques « grand public » mais aussi des approches héritées de l’UX design.
- Simplifier le parcours utilisateur en garantissant le principe du « Dites-le nous une fois » (DLNUF), en prévoyant des solutions audios et en langue étrangère pour faciliter les usages numériques de tous les publics, en utilisant un langage Facile à lire et à comprendre (FALC) et en adoptant une charte graphique « universelle » pour développer une grammaire partagée du numérique.
- Accompagner les professionnels de l’action sociale et intervenants de la médiation numérique en les outillant et en les formant aux usages numériques, en mobilisant les plateformes de service et leurs concepteurs dans la formation des professionnels et en créant des liens durables entre médiation numérique et intervenants sociaux.
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