Si la contamination des eaux par les macro et microplastiques devient désormais évidente, celle des autres milieux demeure mal connue, et ses effets mal identifiés. Les premiers résultats des recherches menées par l’ADEME sur cette question commencent à être disponibles, nous en dressons ici un panorama.
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La contamination des eaux par les plastiques et les microplastiques (MP) commence désormais à être renseignée, ainsi que les impacts qui y sont associés. La contamination des milieux terrestres peut, quant à elle, être estimée jusqu’à 4 à 23 fois plus élevée.
Les premiers résultats issus de recherches financées par l’ADEME
En 2019, l’ADEME a lancé un travail de recherche sur la contamination des sols en MP. Ainsi, l’Institut de recherche Dupuy de Lôme a perfectionné une méthode d’extraction et de comptage des MP issus de 33 sols1 français collectés et homogénéisés par l’INRAE d’Orléans dans le cadre du réseau de mesure de la qualité des sols (RMQS). Une difficulté analytique réside dans la concentration élevée de matières organiques dans les sols qui perturbe la caractérisation des plastiques. Les MP appartenant à la fraction granulométrique [315 µm ; 5 mm] ont été analysés et retrouvés en moyenne à 15 MP.kg-1 de sols agricoles, prairiaux ou forestiers1.
Au-delà de ce travail de connaissance du bruit de fond de la contamination environnementale des sols en France, l’ADEME a soutenu le projet CINAPE, sur un sol agricole ayant reçu il y a plus de 30 ans un compost d’ordures ménagères fortement chargé en plastique. La taille des MP recherchés était comprise entre 2 et 5 mm. Les concentrations retrouvées dans les 5 premiers centimètres de sol étaient de 291 MP.kg-1 de sol. Sans pouvoir en attribuer la responsabilité aux MP, le sol amendé présente des tendances convergentes pour des impacts négatifs sur les vers de terre (abondance, biomasse, catégorie écologique des vers) au regard de ces indicateurs mesurés sur les populations de vers de terre d’un sol témoin (sans amendement).
Au regard de la possible contamination en MP des produits résiduaires organiques (dont le compost fait partie), le projet PRO est en cours pour caractériser 80 échantillons d’une vingtaine de familles de produits résiduaires organiques. Les résultats sont attendus fin 2023.
La question des plastiques biodégradables
Le plastique, issu de l’industrie pétrochimique, a une dégradation lente dans l’environnement. En fonction de la nature du plastique et des conditions environnementales rencontrées, sa fragmentation et la potentielle dissipation de la contamination environnementale peuvent durer plusieurs dizaines de milliers d’années. Face à cette contamination diffuse pérenne des plastiques, des alternatives ont été envisagées. Ainsi, des plastiques biodégradables ont été développés. Ils sont d’origine pétrochimique (ex. : polybutylène adipate téréphthalate, le PBAT) ou biosourcée (ex. : acide polylactique, le PLA). Ils sont revendiqués biodégradables dans les sols, voire dans les eaux. Certains d’entre eux sont estimés compostables.
Bien que les plastiques compostables puissent réduire le volume des déchets en plastique s’ils entrent dans une filière de traitement biologique, ils peuvent toujours contribuer au problème des MP s’ils ne sont pas correctement compostés.
La compostabilité des sacs de fruits et légumes en plastique biodégradable
En 2018, l’ADEME a lancé un travail de recherche sur le devenir des sacs fruits et légumes en plastique biodégradable lors de leur traitement en compostage domestique et en compostage industriel. Les conditions de compostage domestique variaient en fonction de la saison, des modalités d’ensachage des déchets de cuisine et de table (ex. : sacs en double épaisseur ou non) et du brassage ou non des tas.
La norme NF T51-800 permet de caractériser les plastiques compostables en condition domestique. Elle juge notamment du fractionnement des plastiques à un seuil de 2 mm puis estime la biodégradation de ces derniers par le suivi de l’émission de CO2 au regard d’un témoin.
Les sacs répondaient aux exigences de cette norme, mais la recherche a entrepris de les détecter en dessous de 2 mm. Selon les conditions de compostage domestique, des fragments de plastiques d’une taille variant de 0 à 2 mm sont observés jusqu’à 20 mois de compostage. Cela signifie que les plastiques ne sont en réalité pas entièrement dégradés et qu’ils contribueront à la contamination des sols et/ou des eaux lorsque les composts seront épandus.
L’ADEME poursuit son soutien aux recherches sur la biodégradabilité des plastiques
Pour le suivi du compostage en conditions industrielles, les MP biodégradables n’ont pas été observés à la fin du compostage. En revanche, les déchets verts associés au compostage des déchets alimentaires apportent avec eux des plastiques et des MP issus de plastiques pétrosourcés. Aucun compost ne présentait de risque écotoxicologique. Des essais sur des tests terrestres et aquatiques ont été réalisés sur des indicateurs biologiques végétaux, animaux et microbiens et n’ont pas montré de toxicité. Il est à noter que les normes régissant les plastiques biodégradables, ou biodégradables et compostables, ne demandent, pour la majorité d’entre elles, qu’un test écotoxicologique de phytotoxicité. L’ADEME a publié un rapport qui décrit et analyse les intérêts et les manquements des normes aujourd’hui existantes sur la biodégradabilité des plastiques.
Toutes natures de plastiques confondues, l’ADEME accompagne aujourd’hui une vingtaine de projets de développement de méthodes d’analyse, de caractérisation des milieux et d’impacts.
1. Projet MICROSOF : Recherche de microplastiques dans 33 sols français. 2023. Rapport final en cours de rédaction.
Les méthodes de métrologie
Après l’échantillonnage des milieux solides, on peut résumer les méthodes et leurs objectifs dans la liste ci-dessous :
– Recherche et caractérisation de la masse des MP : destruction des particules par la chaleur, associée à la chromatographie en phase gazeuse couplée à l’analyse de la masse des éluats. Cette approche pourrait permettre de renseigner des seuils de contamination environnementale.
– Recherche du nombre de microplastiques, de leur taille, de leur forme et de leur nature : non-destruction des particules via des tamisages à sec et des flottations densimétriques associée à une caractérisation de la nature du plastique via par exemple la spectrométrie infrarouge à transformée de Fourier. Cette approche caractérise la physique des particules et peut permettre des liens avec des mesures d’impact.