La pandémie de Covid-19 s’est imposée comme une crise systémique qui a mis en lumière plusieurs problématiques de notre capitalisme financier : fragilité des chaînes de valeur mondiales, renforcement des inégalités socio-économiques, pérennité des émissions de gaz à effet de serre malgré un arrêt brutal de l’activité… Au cœur de ces interrogations, les fondements même de ce modèle économique dont la résilience est plus que jamais mise à mal, et un constat sans équivoque : une transformation structurelle est nécessaire. En ce sens, la crise sanitaire constitue-t-elle un point de rupture réel pour le capitalisme en Europe ?
En première ligne de cette action collective s’imposent l’économie réelle et la finance, appelées à reconsidérer le fonctionnement et la finalité même de leurs chaînes de valeur pour les inscrire dans le long terme. Au-delà de générer du profit pour assurer leur pérennité, elles doivent catalyser un impact positif sur l’environnement et les communautés qui les entourent, et intégrer pleinement les défis sociaux et environnementaux dans leurs stratégies.
En France, développer et renouveler le secteur de l’industrie en particulier s’est imposé comme une priorité quinquennale sous le nom de « réindustrialisation responsable », avec l’annonce du plan « France 2030 » y allouant un budget de 30 milliards d’euros. Celle-ci s’est faite d’autant plus pressante avec la crise sanitaire qui a permis de mesurer la fragilité de notre tissu industriel et notamment de notre souveraineté médicale, face à la pénurie de masques de protection et de respirateurs artificiels importés de l’étranger. A cette nécessité de réindustrialiser se conjuguent les enjeux de développement durable : ce processus doit être décarboné et technologique pour être soutenable et créateur d’emplois. Ainsi, comment reconstituer le tissu industriel du « monde d’après » ?
D’un point de vue plus général, l’Union Européenne et le territoire français affichent depuis quelques années l’ambition de sortir progressivement de la société du “tout-jetable”, d’une production et d’une consommation linéaire grâce à un nouveau modèle d’activité : l’économie circulaire. Tandis que la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte de 2015 la reconnaît comme un objectif national en France, l’Union Européenne et son Green Deal ont su lui donner une place centrale avec le Plan d’action européen sur l’économie circulaire présenté en mars 2020. Comment réussir ainsi à sortir de ce modèle du tout-jetable grâce aux entreprises ?
Il convient de se souvenir que ces changements structurels de modèle économique ne pourront se faire sous la seule impulsion des entreprises. Au regard de leur résilience durant la pandémie, il est nécessaire d’intégrer pleinement les institutions financières dans cette transition juste et responsable en valorisant le nouveau modèle de « finance à impact ». L’Union Européenne en a d’ailleurs parfaitement saisi les potentialités et a fait évoluer sa législation en conséquence, forte notamment de sa Sustainable Finance Disclosure Régulation (SFDR) et son projet de taxonomie européenne. La labellisation ISR et la Loi Pacte en ont également fait un domaine où la France se positionne. Face à cet essor, il est ainsi intéressant de réfléchir aux possibilités que ce nouveau modèle de finance offre pour implémenter ce nouveau capitalisme juste et responsable.