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L’immense biodiversité sous-estimée des récifs coralliens du Pacifique

​​​​​Les quelque 58 000 échantillons prélevés par la mission Tara Pacific parlent enfin ! Après un travail colossal de séquençage génétique et d’analyses moléculaires, impliquant plusieurs équipes du CEA, la mission fournit une base de référence inédite de la biodiversité du microbiome des récifs coralliens, encore largement sous-estimée. Grande première, elle propose également l’analyse combinée de données « omiques » et environnementales.​​

​Au cours de son voyage de 2016 à 2018, l’expédition Tara Pacific a parcouru plus de 100 000  km sur l’océan Pacifique. Parmi les objectifs : mettre en lumière une nouvelle facette de la biodiversité microbienne ; et comprendre les stratégies d’acclimatation des récifs coralliens aux variations environnementales, notamment les liens complexes entre génomes, transcriptomes, métabolomes et fonctions écosystémiques. L’expédition a ainsi sondé les écosystèmes coralliens de 32 îles ainsi que les eaux de surface de 249 sites, ce qui a permis de collecter près de 58 000 échantillons.

« Le consortium a procédé à un travail colossal de traitement des échantillons, de séquençage à très haut débit des génomes, de bio-informatique puis d’analyses moléculaires biologiques et écologiques », indique Patrick Winckler, directeur du Genoscope (CEA-Jacob) qui, avec des collègues du LSCE (CEA-CNRS-UVSQ) et des autres partenaires de Tara Pacific, est co-auteur de huit premiers articles scientifiques publiés dans Nature. Des publications qui présentent les principaux aspects de cette mission unique.

Un travail collectif et en open source

A commencer par l’organisation même de l’expérience, regroupant une centaine de chercheurs de nombreuses disciplines et nationalités, ainsi que la méthodologie de l’échantillonnage pour traiter leur immense volume.« Ces échantillons comprennent 150 terabases de séquences génétiques, équivalentes au séquençage de 50 000 génomes humains », illustre Quentin Carradec, du CEA-Jacob. Une attention particulière a été apportée au cadre de production des données de Tara Pacific, avec un effort important et significatif pour les structurer et les gérer. L’objectif premier étant de les rendre « open source » et accessible à une communauté plus large. Car ces données sont riches d’enseignements alors que l’étendue des écosystèmes coralliens est encore inexplorée à l’échelle océanique globale.

Le nombre de micro-organismes serait encore largement sous-estimé

Les récifs coralliens font partie des écosystèmes les plus diversifiés de la planète. Ils représentent 5% des espèces déjà connues dans le monde et abritent 30% de la diversité marine. Tara Pacific s’est donc intéressée aux trois biomes que sont les coraux, les poissons et le plancton, en révélant que ce dernier présentait la plus grande diversité de bactéries. Les millions de micro-organismes qui sont impliqués dans la productivité, la biodiversité et la santé des récifs, ont également été passés au crible. En conduisant différentes analyses sur la présence des communautés microbiennes dans les biomes, les chercheurs ont montré qu’elle était équivalente à l’ensemble de la biodiversité microbienne connue de la planète. Et cela alors même que ces récifs coralliens ne représentent que 0,2% de la surface des océans. 

Vulnérabilité et résilience de certains coraux face au réchauffement de l’eau

Autre facteur impliqué dans la biodiversité des récifs coralliens, leur environnement ! D’où leur fort déclin dû au changement climatique, et dont la mortalité pourrait atteindre, selon le Giec, 70 à 90% dans le cas d’un réchauffement de plus de 2°C. Cette préoccupation est au cœur de Tara Pacific qui avait prévu sur chaque site le prélèvement de données physico-chimiques de l’eau et des aérosols, ainsi que le contexte environnemental obtenu à partir de registres taxonomiques, climatologiques, modèles biogéochimiques et observations par satellite. Et c’est là la grande originalité et force de la mission que d’avoir su coupler ces données à celles des « omiques ». Les chercheurs ont notamment pu établir des corrélations entre les changements de température de l’eau et la longueur des télomères de l’ADN (marqueurs de santé) de certains coraux ; tandis qu’ils découvraient chez d’autres des capacités de résistance à la chaleur.

Et ce ne sont que de premiers résultats !

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