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Sommet d’ouverture de la COP 28: Le mirage de l’Autorité

Ecrit par Bertrand Piccard

Dans la salle plénière de la COP 28, j’écoutais attentivement les interventions officielles des Chefs d’Etat s’exprimant à l’ouverture du sommet. Et je dois dire que j’ai trouvé cela un peu triste. Quel décalage entre les paroles et la réalité; entre les bonnes intentions et les résultats!

Ils expriment à Dubaï tout ce qu’ils aimeraient faire. Ils mentionnent tout ce qu’ils ont déjà fait. Mais la réalité est que l’on n’en voit pas véritablement les résultats, puisque les émissions de CO2 continuent à augmenter, tout comme la pollution. La pauvreté, elle aussi, a recommencé à croître au niveau mondial.

En fait, ces dirigeants ne sont que des hommes et des femmes qui ont des charges infernales sur les épaules. Certains ont des guerres à leur portes. Presque tous ont des problèmes financiers, des problèmes économiques, du chômage, de l’inflation… Et ils se retrouvent là, face au monde entier, avec une énième difficulté à traiter : les changements climatiques.

Quand on les voit à l’ouverture de la COP, se succéder à la tribune dans un protocole impeccablement réglé, il en ressort une impression troublante. On pourrait croire qu’ils ont beaucoup de pouvoir. Mais est-ce vraiment le cas? Ils en ont peut-être beaucoup moins qu’on ne le croit, soumis comme ils le sont à tant de vents tourbillonnants. Des écologistes d’un côté, aux intérêts économiques publics et privés de l’autre, sans même parler de l’impératif de plaire pour être réélus. Ainsi, plus que des décideurs impactants, on devine souvent les arbitres d’un match entre plusieurs équipes qui ne suivent pas forcément les règles du jeu. 

Du coup, le pouvoir est ailleurs. En discutant avec certains, j’ai compris à quel point ils ont les mains liées et craignent les oppositions, publiques et privées, une fois rentrés chez eux.

Pendant ce temps, le monde ne s’arrête pas. Les problèmes climatiques vont déjà plus vite que les efforts pour y remédier. Si nous continuons ainsi, il n’y a qu’une issue, et pas des plus réjouissantes. 

Ironiquement, ceux qui ont parlé de la manière la plus claire au Sommet ne sont pas ceux qui ont le plus de pouvoir, ceux qui sont responsables de la destinée d’un Etat, aussi grand soit-il. Qui a fait un réquisitoire en règle contre les énergies fossiles? Le Secrétaire Général des Nations Unies, écouté mais peu suivi. Qui a montré l’exemple en interdisant les importations de produits issus de la déforestation ? C’est l’Union Européenne, qui est une organisation supra-nationale. Qui a parlé franc aux compagnies pétrolières et gazières en leur renvoyant la responsabilité de décarboner ? C’est le président de la COP 28, qui est le patron d’une entreprise fossile.

Si le pouvoir est fragmenté, ce qu’il faut, c’est réunir les morceaux. N’avoir plus qu’une seule équipe à coacher. S’ils souhaitent surmonter la multiplicité des défis auxquels ils sont confrontés, les dirigeants ont besoin d’outils qui fédèrent les forces en présence.

Ces outils existent aujourd’hui. Les énergies renouvelables dont le prix s’est effondré et les technologies propres qui permettent d’énormes économies financières en diminuant le gaspillage. Cela devrait réunir les partis de gauche attachés à la défense des plus démunis et ceux de droite à qui l’on offre de nouvelles opportunités industrielles, sans oublier ceux pour qui la priorité revient à la souveraineté énergétique. 

Il reste à utiliser le langage qui permet d’y arriver. En promouvant les avantages de l’action climatique plutôt que seulement son urgence, ils pourront alors rallier les différents pans de la société à la cause commune. En parlant solutions rentables plutôt que problèmes coûteux. 

C’est maintenant aux négociateurs d’entrer en jeu, au secteur privé de s’engager, aux institutions à exercer des pressions, et c’est cela, davantage que les discours d’ouverture, qui définira le succès de la Conférence. Nous en reparlerons ces prochains jours, avec les avancées que nous pourrons constater sur le terrain. Et, inlassablement, continuerons le plaidoyer en faveur d’une écologie réaliste et efficiente.

En fin de compte, ce furent deux jours que j’ai trouvé plus intéressants sur le plan psychologique que sur le plan purement climatique.

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