Le 5 mars 2021, à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, le barreau de Paris organisait un colloque sur le thème « Faire avancer les droits des femmes : coopération internationale, coopération interprofessionnelle ».
En ouverture, la vice-bâtonnière de Paris Nathalie Roret a rappelé la vocation de cet événement : relier deux dimensions, l’international et l’interprofessionnel, car « au barreau de Paris, il n’y a pas les combats lointains, « de là-bas » et les combats d’ici. La lutte pour les droits des femmes est un seul et même bloc. L’unique finalité qui nous intéresse est l’émancipation pleine et entière de toutes les femmes ».
C’est ainsi que le barreau de Paris a eu l’honneur d’accueillir Sima Samar, figure emblématique de la défense des droits humains en Afghanistan et dans le monde. Médecin, toute première femme afghane à être nommée vice-présidente d’Afghanistan, ancienne ministre de la condition féminine en Afghanistan, ancienne rapporteure spéciale des Nations-Unies et ancienne présidente de la Commission nationale afghane pour les droits de l’homme, elle a partagé sa riche expérience dans la lutte pour les droits des femmes. Un combat qui pour elle, passe avant tout par l’accès à l’éducation qui seule peut faire évoluer les choses. « Le droit à une éducation de qualité est fondamental, c’est un droit de l’homme vital » a-t-elle ainsi déclaré à plusieurs reprises. Un droit pour lequel elle se bat grâce à l’ONG Shahada, qu’elle a créée en 1989 et qui gère aujourd’hui une cinquantaine d’écoles de filles. Elle a également souligné l’importance d’avoir des femmes à des positions de pouvoir, estimant toutefois que cela n’a d’intérêt que si elles sont féministes et se soucient des droits des femmes, ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas, a-t-elle regretté, notamment en Afghanistan où le Parlement compte certes 25 % de femmes mais qui souvent ne soutiennent pas les mesures proposées en leur faveur.
Un point de vue partagé par Gwenola Joly-Coz, Présidente du Tribunal judiciaire de Pontoise, qui lui a succédé à la tribune pour parler de coopération interprofessionnelle : « Être une femme à une place de pouvoir ne suffit pas. Il faut des femmes engagées, formées, compétentes, et avec une vision de ce qu’elles veulent faire aux postes où elles sont ». Fondatrice de l’association Femmes de Justice, Gwenola Joly-Coz a soulevé la nécessité de développer la coopération entre magistrats et avocats pour faire avancer les choses, notamment par la création de formations communes au sein de l’École Nationale de la Magistrature, mais aussi par l’organisation de rencontres plus informelles, en dehors des juridictions, à l’image des « Cafés du Palais » qu’elle a mis en place à Pontoise pour favoriser les échanges interprofessionnels. Cette idée a séduit la vice-bâtonnière de Paris qui espère pouvoir organiser très prochainement de telles rencontres avec les magistrats parisiens, au sein de la nouvelle Maison des avocats. Par ailleurs, elle travaille d’ores et déjà avec la vice-bâtonnière Dominique Attias et Clothilde Lepetit, membre du Conseil de l’Ordre, à la création de formations communes interprofessionnelles magistrat.e.s/avocat.e.s sur le droit des mineurs et les violences faites aux femmes.
Sur cette problématique particulière des violences faites aux femmes, Gwenaëlle Thomas-Maire, directrice de Droits d’urgence, a présenté la plateforme numérique Droitdirect.fr, mise en ligne en octobre dernier, qui a vocation à faciliter l’accès au droit pour les victimes de violences conjugales, et plus précisément à les orienter vers le professionnel adapté, tout en facilitant la coopération entre les différents acteurs : policiers, travailleurs sociaux, médecins et avocats. Le barreau de Paris a choisi de soutenir le développement de cette plateforme en 2020, qui se fait selon un processus de co-construction, car « le numérique peut être un outil de secours et de service très bienveillant » comme l’a souligné la vice-bâtonnière Nathalie Roret. Le barreau de Paris avait ainsi déjà décerné en 2017 un prix à l’association Avocats Femmes et Violences pour développer l’application SOS Violences.
Cette journée a enfin été l’occasion de rappeler que le combat pour les droits de femmes n’est pas qu’une affaire de femmes, mais bien aussi une affaire d’hommes : le bâtonnier de Paris n’a pas manqué de le répéter, tout comme le bâtonnier Jean-Marie Burguburu, récemment nommé à la présidence de Commission consultative des droits de l’homme : « Quand on parle des droits de l’homme, on parle aussi des droits des femmes, et lorsqu’on parle du droit des femmes, il faut aussi qu’il y ait des hommes qui se battent pour les droits des femmes ! ».